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Louis Bernardin (moi) (suite)

 

Il y avait le fameux pont de perches que mon père avait construit, malgré tout le monde qui avait besoin de réparation de temps à autre.

 

Souvent, au printemps, le pont se faisait brasser pas mal fort par le courant d’eau devenu violent. Il fallait que les perches soient bien clouées. Ça rendait la chose plus facile pour aller travailler sur les trente acres et les quatre-vingts acres un peu plus loin. Mais très souvent, il nous fallait mener les animaux manger le long du chemin de fer. C’est là que nous développions une patience inégalée à regarder le bétail marcher de long en large le long des rails et toujours être là à temps pour éloigner le bétail devant les trains. De temps en temps, les vaches réussissaient à monter sur la voie ferrée et il fallait être un bon coureur pour arriver à temps et les éloigner de là. Ensuite, nous étions en congé l'été durant les mois de juillet et août. Souvent, il fallait rester à la maison en septembre pour finir les travaux d’automne. S’il pleuvait, on pouvait se rendre à l’école sous les regards peu ordinaires de nos maîtresses de classe. Les quelques permissions d’été étaient de se baigner dans la carrière à Désilets ou celle à Hewko. Ça nous embêtait quand Fleurette venait avec nous, une poignée de gars, parce qu’on ne pouvait pas se baigner tout nus. Les maillots de bain dans ce temps-là étaient rares et pas toujours à portée de main. Alors on se baignait avec nos sous-vêtements.

 

Une année, on célébrait le côté de la famille Beaudry, parce qu’elle devait déménager à Saint-Thomas, en Ontario, afin de trouver du travail dans le tabac, dans la vallée non loin de Niagara Falls. Georges Beaudry étant de notre âge, on a pensé l’amener à la carrière à Hewko pour une baignade d’adieu. En arrivant, après nous être déshabillés, nous voilà tous à l’eau. Quelques minutes plus tard, tous debout, fiers de notre exploit, nous avions perdu George. Alors, de nouveau dans l’eau, 10 à 12 pieds de profondeur. Un de nous trouva George et on l’a sorti crachant de l’eau, mais sain et sauf. Après nous être renseignés sur ce qui n’allait pas, George avoua qu’il ne savait pas nager. Il ne faut pas tenir les choses pour acquises. Une quarantaine d’années plus tard, Maria, ma deuxième épouse, m’a dit : « Pourquoi nous autres, on peut pas aller en Floride? « Ben! Oui! Que je lui réponds, pourquoi nous autres, on peut pas aller en Floride? » Je lui ai suggéré alors qu’on prenne son LeBaron, et, avec nos cartes de crédit, on prend le chemin pour la Floride. J’ai conduit 800 km par jour pour nous éloigner au plus sacrant, et chaque soir avant de nous coucher, je préparais un bon coup pour Maria. Tellement bon qu’elle ne voulait pas souper, seulement se coucher. Moi, je suis toujours prêt à faire des sacrifices, alors j’acceptais. On a eu des problèmes avec le LeBaron du commencement à la fin. Nous avons passé des fins de semaine dans les grands magasins en attendant que la voiture soit arrangée. De peine et de misère, on a rencontré nos amis les Comte de Lourdes et on a abouti dans un motel en Floride. Un bon matin, je voulais nous réapprovisionner en boissons et la voiture ne voulait pas partir encore une fois. Alors, j’ai dit à Maria de se tenir tout près du LeBaron tandis que moi, j’allais chercher le camion du CAA.

 

En traversant la grande cour qui entourait les motels, j’ai passé tout près d’un personnage assis dans une chaise, bien installé, et qui regardait la scène. Il me dit en me voyant passer : « Car trouble? I know something about trucks and cars! – Well, je lui dis, you see my wife standing beside the car, she will tell you what’s the problem. » Et je continue. Lui se rend à l’auto et demande à Maria : « What’s the problem? » Elle lui répond dans la langue de Shakespeare qu’elle ne veut pas démarrer. Il a immédiatement reconnu l’accent de mon épouse, et lui demande si elle parle français. Elle lui dit oui et qu’elle vient de Sainte-Anne et que son époux vient d’Élie. Elie? Il lui demande son nom. Elle lui répond : Louis Bernardin.

 

Il nous a déclaré qu’il était le George Beaudry qui avait échappé à la noyade dans la carrière à Hewsko. Quelle coïncidence! Je ne l’avais pas revu depuis.

(suite au prochain numéro)

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