Les enfants de Yuki, après deux ans d’université au Manitoba, ont chacun à leur tour, à trois ans d'intervalle, consacré une année entière à étudier le japonais à l’Université Tokai au Japon et à s’entraîner avec son réputé club de judo, les deux, de façon intensive. Nous vous présentons les écrits combinés de leur journal de bord respectif, lesquels seront émaillés de notes rétrospectives et d’échanges sur leur expérience.
4 octobre 2011
Les finesses de la langue japonaise
Le japonais est une langue très complexe. Par exemple, nous apprenons les verbes transitifs et intransitifs en ce moment. Pour ceux qui ne sont pas certains de la différence entre les deux, un verbe transitif est un verbe accompagné d'un complément d'objet direct ou indirect et un verbe
intransitif est un verbe qui n’en a jamais (selon Wiki). Ou, comme je le comprends : transitif = verbe d’action; intransitif = verbe passif.
En français, on dit :
1) J’ouvre la porte. (action)
2) La porte est ouverte. (état ou condition passive)
On utilise le même verbe « ouvrir », mais on réarrange le reste de la phrase pour exprimer un sens différent. Eh bien… ce n’est pas aussi simple en japonais. En japonais, on emploie des verbes différents selon que le sujet (p. ex. la porte) est ouvert par quelqu’un (action) ou que le locuteur désire décrire l’état actuel de la porte (condition passive). Dans le premier cas, on emploiera akemasu et dans le second akimasu. Si ça vous intéresse, voici d’autres exemples :
- laisser tomber : otoshimasu; être tombé : ochimasu
- allumer (la lumière) : tsukemasu; être allumé : tsukimasu
- fermer : shimemasu; être fermé : shimarimasu
… et bien d’autres. Ce qui veut dire plus de vocabulaire à apprendre, à mémoriser et à entasser dans ma petite tête déjà pas mal pleine. Mais il paraît que nous n’utilisons qu’une petite partie de notre cerveau… alors je ne peux pas vraiment dire que j’ai rempli mon cerveau au maximum de sa capacité… encore. 😉
Apprendre le japonais a aussi ses petits plaisirs. L’autre jour, un étudiant a mal prononcé le mot jikan en adoucissant la première syllabe, ce qui a donné le mot chikan. L’enseignante et quelques étudiants se sont mis à rire aux éclats. Me demandant ce qu’il y avait de si drôle, j’ai consulté mon dictionnaire. La définition : obsédé sexuel, agresseur sexuel. Voilà qui explique! 😄
C’est amusant aussi quand des étudiants coréens de ma classe parlent japonais et que je ne comprends rien. Je ne pourrais même pas m’imaginer que c’est du japonais si je l’entendais en dehors de la salle de cours.
C’est le temps de continuer à étudier. À venir ce week-end : aller magasiner avec ma coloc dans Shinjuku et aller voir quelques-unes des judokas de Tokaï combattre dans un tournoi.
10 octobre 2011
Nouvelles expériences
J’ai finalement eu l’occasion de prendre le train et de voir autre chose que le campus universitaire. Samedi, ma coloc Moe et moi avons pris le train jusqu’à Sinjuku, un quartier commercial célèbre de Tokyo. Je ne crois pas avoir jamais croisé autant de gens dans une journée. La gare était BONDÉE de gens marchant dans toutes les directions. En fait, pas mal tous les endroits au Japon sont bondés de monde.
À Shinjuku, nous avons fait un peu de magasinage. J’ai acheté un maillot de bain une pièce (obligatoire pour utiliser la piscine de l’université), quelques vêtements (ironiquement de H&M et de Forever 21, deux boutiques américaines) et un excellent livre de recettes japonaises en anglais. Alors aussitôt que j’aurai le temps, je vais commencer à étudier la cuisine japonaise, ce que je veux faire depuis quelque temps déjà.
Mon endroit favori à Shinjuku est probablement la librairie Kinokuniya. Je pourrais passer des heures dans cette librairie (dans n’importe quelle librairie, en fait), où il y a huit étages remplis de livres. Et au 7e étage, il y a plein de romans et de livres en anglais, ce qui pour moi représente le paradis! Hi hi! Au moins, je sais où aller si j’arrive à finir tous les romans que j’ai apportés du Canada.
Moe, ma coloc
Un gars déguisé en Jack Sparrow (Johnny Depp). La ressemblance est incroyable!
Nous sommes revenues tard ce jour-là et j’étais morte de fatigue. Magasiner est fatigant en soi, mais au Japon, ce l’est 10 fois plus, avec tant de personnes qui te bousculent accidentellement, et quand tu dois te faufiler pour contourner les gens dans les rues et à la gare. Puis, même quand tu as fini ton magasinage et que tu reviens chez toi, les trains sont bondés et il n’y a aucune place libre pour s’asseoir. Quand tu finis par arriver à la maison, tu es épuisé.
Le lendemain, je devais me lever tôt pour reprendre le train, cette fois pour me rendre au Nihon Budokan pour assister aux combats de quelques judokas de Tokaï qui participaient au tournoi des étudiants universitaires du Japon. Le site du tournoi était gigantesque. J’y étais déjà allée avec mon père deux ans plus tôt, mais je ne me souvenais pas que c’était si grand.
Il n’y avait que cinq surfaces de combat… et je dis que parce qu’il y avait environ 30 à 40 athlètes pour chacune des huit catégories de poids. Au Canada, même aux championnats nationaux, nous n’avons qu’environ 15 à 20 judokas par division. Franchement, comparé au Canada, le nombre de personnes qui pratiquent le judo au Japon est ahurissant. Je le savais avant de venir, mais voir un tournoi de cette taille est quand même tout un choc.
Il existe quelques différences intéressantes entre les tournois japonais et les tournois canadiens. Au Japon, il n’y a pas de judogi bleu. On se sert de ceintures rouges et blanches au lieu pour différencier les combattants. Pour le système de points, ce qui serait facilement jugé un yuko au Canada n’est même pas reconnu ici. Et ce qui serait probablement un wazari ou un ippon au Canada ne se fait accorder que le pointage d’un yuko. Le tournoi s’est déroulé de façon très efficace… euh… est-ce que ça signifie que je dis que les tournois au Canada ne le sont pas? Comparé au petit nombre de participants aux tournois canadiens et des longues pauses quand les écrans de télévision ne fonctionnent pas, le Japon est beaucoup plus efficace. Le tournoi a commencé à 9 h et s'est terminé à 15 h. Et ça, même avec le grand nombre de participants par catégorie de poids que j’ai mentionné plus tôt.
J’ai aussi eu la chance de rencontrer la tante de mon père, Shizuko. Je ne l’ai vu que pour quelques minutes, mais je suis repartie beaucoup plus lourde qu’avant. Elle m’a donné un sac plein de collations japonaises et un peu de compote de pommes.
Je suis retournée au dortoir… encore fatiguée. Pris le métro par moi-même. Je commence à comprendre un peu mieux le système de métro, mais je suis encore désemparée quant aux différentes lignes et aux différents types de trains (express, local, express rapide). Espérons que je ne m’y perdrai pas trop souvent avant de pouvoir m’y retrouver.
18 octobre 2014
Mes difficultés au Japon
Après six semaines au Japon, il y a certaines choses que je trouve personnellement difficiles ici. Je ne les ai pas toutes remarquées au début, mais après un certain temps, elles s’additionnent et deviennent tout un problème si je ne m’en occupe pas.
1. Lire le japonais
Le plus dur est d’être incapable de lire… à peu près tout. Non seulement je ne comprends pas mes propres devoirs, mon horaire de classe ou le menu du restaurant, ne pas pouvoir lire ajoute à mon stress général! Lorsque j’écris mes devoirs, s’il y a un mot ou un caractère que je ne comprends pas, ça peut m’empêcher de comprendre la phrase. Ça me rend la vie très difficile.
2. Langue
Certains se demanderont peut-être pourquoi ce n’était pas mon premier choix comme difficulté. Bien, si on peut lire, on peut s’en sortir sans trop parler. Mais les deux vont ensemble. Ne pas pouvoir comprendre les instructions, que ce soit en classe ou à bord du train, que ça vienne d’un enseignant ou d’un ami, peut être pas mal frustrant. Aussi, c’est facile de mal comprendre quelqu’un et de faire quelque chose à l’opposé de ce qui est demandé. Essentiellement, ma vie entière dépend de ce que je peux réellement comprendre. Et quand on pose des questions, ou quand on parle tout court, ça peut être assez difficile de s’exprimer de façon compréhensible.
3. Compréhension de la culture
Celle-ci se rapporte aux deux premières et c’est la signification des mots et la façon dont je les interprète. Voyez-vous, quand vous entendez quelque chose dans votre langue maternelle, votre cerveau l’interprète d’une certaine façon. Mais le même mot dans une autre langue sera interprété différemment. À cause de ça, de toutes les choses qu’on me dit de faire, de remettre ou de remplir, j’en oublie une bonne partie. Pourquoi? La plupart du temps, c’est de ma propre faute, mais souvent, je réalise que je n’ai pas complètement compris ce qu’on attendait de moi. Et c’est pourquoi c’est aussi difficile de comprendre les intentions des gens ici, et donc de reconnaître ceux qui ont de bonnes intentions et ceux qui n’en ont pas.
4. Magasinage
Ceci est probablement la raison pour laquelle le Canada me manque : au Japon, je ne trouve pas toujours l’équivalent de ce à quoi je suis habitué. Et quand je le trouve, c’est trois fois plus petit. L’autre jour, je voulais acheter des concombres. Je suis passé quatre fois devant la section où ils se trouvaient pour me rendre compte qu’il n’y avait que de minuscules concombres. C’est la même chose pour à peu près n’importe quoi : calepins, crayons, nourriture, tout ici est de plus petite taille ou en plus petite quantité. Et on dirait qu’ils n’ont pas de déodorant en bâton… Ça fait en sorte que tout prend plus de temps et c’est parfois contraignant.
5. Espace
Le dernier, mais non le moindre, le manque d’espace est difficile à s’accoutumer. Ce n’est pas quelque chose qu’on regarde de prime abord, mais après avoir été à plusieurs endroits, on ressent cette constante contrainte d’espace. On doit se préoccuper beaucoup plus des autres personnes, de l’endroit où on place ses choses, et même de la façon dont on se positionne dans une pièce. Sinon, on peut sans le vouloir déranger les gens autour.
Ceci était un aperçu des cinq plus importantes difficultés auxquelles je suis aux prises au Japon. Il y en a bien d’autres, mais je ne les ai pas encore bien définies et elles ne concernent peut-être que moi… mais ça, c’est une autre histoire!